Patrimoine signifie littéralement « héritage des pères ». Nous construisons effectivement notre mémoire culturelle sur un socle de biens artistiques à 95% masculins. Construire du matrimoine consiste à faire émerger l’ « héritage des mères », à savoir rendre à nouveau visibles les biens artistiques transmis par les femmes qui nous ont précédé-es.
Le but est de réunir ce patrimoine déjà existant et ce matrimoine qui reste à faire émerger :
une dose de Patrimoine + une dose de Matrimoine
= un « Héritage », mixte et égalitaire
Si, concernant le théâtre, 85 % des textes joués sont écrits par des hommes, l’importance du répertoire ancien (au sens large, textes entrés dans le domaine public) parmi les oeuvres représentées doit être prise en compte. Pour la période allant du 17e siècle à la première moitié du 20e, cette part de la programmation est probablement à 100% masculine, puisque les autrices du passé sont toutes oubliées ou négligées.
Ce répertoire classique entièrement masculin constitue le patrimoine actuel et représente une part importante du « panthéon littéraire » français dans son ensemble : il est donc, en cela, un fort lieu de légitimation. D’autant qu’il est surinvesti par les institutions nationales, qu’elles soient théâtrales (la Comédie-Française), scolaires (collèges-lycées, conservatoires), et universitaires (Lettres, Études théâtrales). L’accès au théâtre commence le plus souvent par ce répertoire, et c’est à partir de lui que les praticien-nes, mais aussi les publics, construisent leurs représentations genrées de l’art théâtral.
La présence (visible) de pièces écrites par des femmes dans le répertoire-patrimoine, est donc essentielle pour changer les représentations sexuées de la création théâtrale, et rendre la figure de la dramaturge plus familière et légitime dans le paysage théâtral actuel.
- Les femmes n’ont pas écrit pour le théâtre ? Faux, entre le 16e et le 20e siècle, il a existé près de 2 000 autrices de théâtre, rien qu’en France…
- Si quelques femmes ont fait exception, leurs productions furent trop mauvaises pour passer à la postérité ? Faux, beaucoup d’entre elles, dès le 17e siècle, ont été jouées sur les principaux théâtres parisiens, ont fait partie du répertoire de la Comédie-Française, ont reçu des critiques élogieuses, et ont été traduites dans toute l’Europe
Le Mouvement HF interpelle les pouvoirs publics et demande :
Une plus grande parité dans les commémorations officielles :
En 2013 : sur 56 commémorations prévues, 5 seulement honorent la mémoire de femmes, soit 9 % des célébrations retenues
En 2012 : 0 femmes commémorées en littérature, sciences humaines, beaux-arts, musique et cinéma.
En savoir plus et découvrir la liste HF des célébrations de créatrices en 2014
L’entrée de nouvelles femmes au Panthéon :
Lors de son discours du 7 mars à l’occasion de la soirée « Le 8 mars, c’est toute l’année », François Hollande déclara : « Oui, une culture ! Je le dis, ici à la Villette, dans cette Cité des Sciences, nous devons mieux reconnaître la place des femmes dans l’histoire de la République, dans l’histoire même de notre pays avant même la République. Le Panthéon ne compte que deux femmes : Sophie BERTHELOT et Marie CURIE, deux femmes exceptionnelles. Elles ont été accompagnées au Panthéon par leur mari, des hommes exceptionnels. Mais il est arrivé que des hommes exceptionnels aient eu aussi des femmes exceptionnelles qui ne sont pas entrées au Panthéon. Alors, j’attends des propositions – il y en a – pour prendre le moment venu des décisions pour accueillir des femmes au Panthéon. »
Nous attendons…
Voter sur le site de la Consultation nationale
La parité dans la labellisation des Maisons des Illustres
En 2011, le Ministère de la Culture et de la Communication a lancé le label « Maisons des Illustres », ayant « pour vocation de conserver et transmettre la mémoire des femmes et des hommes qui les ont habités et se sont illustrés dans l’histoire politique, sociale et culturelle de la France ». À ce jour, les femmes illustres dont la mémoire est honorée à travers les lieux qu’elles ont habités ne représentent que 8%.
La multiplication des noms de rue et d’établissements publics au féminin.
L’organisation d’une exposition nationale sur les « oubliées de l’histoire » et les « figures de l’ombre ».
La féminisation des noms de poste et de métier.
Toutes actions pour revaloriser le patrimoine féminin ou « matrimoine » auprès des théâtre nationaux (Comédie-Française en premier), des écoles d’art et plus généralement tous les établissements scolaires et universités.