par hfidf | Fév 6, 2018 | Actions, Actualités, Articles et Tribunes
Des associations, des instances en charge de l’égalité entre les femmes et les hommes, des réseaux de femmes et d’hommes d’entreprises engagé.e.s pour la mixité, des expert.e.s sur la question de l’égalité ont décidé de se mobiliser pour lutter contre le sexisme sous toutes ses formes et dans tous les secteurs. L’enjeu est de rendre visibles et identifiables par tous et toutes non seulement les violences sexistes et sexuelles mais aussi les manifestations du sexisme au quotidien et de proposer des actions fédérant les énergies des différent.e.s partenaires, pour lutter contre ce fléau, source d’inégalités entre les femmes et les hommes.
Par conséquent, nous, membres du collectif Ensemble contre le sexisme :
Mouvement HF, Centre Hubertine Auclert, Cercle InterElles, La Clef, Excision, parlons-en !, FNCIDFF, Femix, Femmes Ingénieurs Femmes solidaires, Fondation des femmes, Global Contact, Grandes écoles au féminin, B. Grésy experte égalité, Haut Conseil à l’égalité, Le planning familial, Observatoire de l’équilibre des temps et de la parentalité en entreprise, Onu Femmes France, Social Builder, Solidarité femmes, Toutes Femmes Toutes Communicantes, Wi-filles, Win by Engie.
Réuni.e.s ce jour pour la Journée contre le sexisme, lançons un appel pour pérenniser cette action, tous les 25 janvier, sous la forme d’une Journée nationale contre le sexisme
Plus particulièrement, nous faisons les 22 propositions suivantes :
Parce que l’éducation joue un rôle central pour construire une culture de l’égalité entre les femmes et les hommes, nous proposons de :
Proposition 1 : Veiller à garantir une juste représentation des femmes et des hommes dans les programmes et les manuels scolaires, notamment en rendant visibles des femmes remarquables, et intégrer la question de l’égalité des droits entre les femmes et les hommes dans l’enseignement primaire et secondaire;
Proposition 2 : Promouvoir les formations scientifiques et techniques auprès des filles en montrant qu’elles conviennent tout autant aux filles qu’aux garçons et encourager les entreprises et centres de recherche à permettre à leurs employé·e·s ou aux étudiant·e·s de participer à des actions de promotion des sciences ou de mentorat dans les établissements scolaires sur leur temps de travail;
Parce que, dans les lieux de travail (entreprises et fonctions publiques), se jouent des relations interpersonnelles entre les femmes et les hommes et ont cours des procédures pouvant comporter des biais de sexe, nous proposons de :
Proposition 3 : Inviter les entreprises et les fonctions publiques à afficher une tolérance zéro contre le sexisme, à établir un programme d’action qui définisse les actes prohibés et les sanctions encourues et impliquer les hommes dans toutes ces actions;
Proposition 4 : Rendre obligatoire dans les entreprises et les fonctions publiques, à partir d’un seuil à déterminer, la mise en place d’une cellule d’écoute et d’un.e référent.e chargé.e d’accompagner les victimes de violences sexistes et sexuelles, en veillant à communiquer les coordonnées des structures en charge de l’écoute et de l’accompagnement des femmes victimes de violence;
Proposition 5 : Encourager l’intégration, dans le dialogue social de l’entreprise, d’actions de prévention et de traitement du sexisme et éliminer les biais de sexe dans les systèmes de classification et les procédures RH;
Proposition 6 : Lancer des appels à projet de recherche sur le sexisme au travail (impact sur la santé, sur la performance au travail, sur le sentiment d’appartenance à son lieu de travail, sur les stratégies de résistance) et évaluer régulièrement l’impact des actions engagées par des enquêtes portant sur la perception et l’expérience des salarié.e.s sur le sexisme;
Parce que l’accès à la santé sexuelle et reproductive est un enjeu de santé publique et une condition de l’émancipation et de l’autonomie des femmes, nous proposons de :
Proposition 7 : Faire appliquer les dispositions existantes en matière d’éducation à la sexualité et d’information sur les droits sexuels et reproductifs et impliquer les garçons dans la contraception et les risques sexuels;
Proposition 8 : Garantir au niveau national que toutes les femmes aient accès aux mêmes droits en matière de contraception et d’avortement, quels que soient leur situation et l’endroit où elles vivent : accessibilité, gratuité et confidentialité pour les mineures, les 18-25 ans, les personnes en situation de précarité et de handicap, les femmes étrangères;
Parce que la protection de la santé est un droit fondamental garanti par la Constitution, nous proposons de :
Proposition 9 : Rendre accessible, sur tous les territoires, l’accès à la santé pour les femmes quelles que soient leurs situations familiales et sociales (et notamment les femmes handicapées, les femmes vivant avec le VIH, etc.) et garantir une information et une prévention avec des personnes ressources spécialisées dans les aspects spécifiques de la santé des femmes;
Proposition 10 : Développer la recherche pour une meilleure connaissance des spécificités biologiques des femmes et des hommes ayant un impact sur leur santé, à la fois en matière de prévention et de traitement et produire systématiquement des statistiques sexuées;
Parce que l’art et la culture construisent et transmettent les représentations du monde qui conditionnent nos imaginaires et façonnent notre société, nous proposons de :
Proposition 11 : Valoriser le matrimoine et les œuvres de femmes notamment dans les répertoires des formations artistiques;
Proposition 12 : Appliquer l’éga-conditionnalité à toute structure artistique et culturelle recevant des crédits publics pour garantir une égale présence des femmes et des hommes dans les programmations et un égal accès aux moyens de production, aux réseaux et aux espaces de la visibilité et de la consécration artistique;
Parce que le sport est un enjeu de bien-être, de santé et d’émancipation du corps des femmes, nous proposons de :
Proposition 13 : Adapter et promouvoir toutes les offres de pratiques sportives pour les rendre accessibles aux jeunes filles, aux femmes, en famille, en développant un accès unique (licence unique) de loisirs, de compétitions;
Parce que les médias véhiculent un système de représentations qui est aussi un système de valeurs, qui a pour but de donner à voir un monde pluriel, nous proposons de :
Proposition 14 : Renforcer les contenus audiovisuels (fictions, sport, documentaires, etc.) valorisant la place des femmes dans la société;
Parce que la formation de chacun et chacune au sexisme est le moyen le plus efficace pour l’appréhender et y faire face, nous proposons de :
Proposition 15 : Généraliser et rendre obligatoire l’information des élèves et la formation des professionnel·le·s de l’orientation, des enseignant·e·s et des parents sur le sexisme et le cybersexisme dans les établissements scolaires ainsi que dans les écoles et formations universitaires et artistiques, sans oublier les forums d’orientation et les salons des métiers;
Proposition 16 : Inviter les entreprises, les fonctions publiques, les intermédiaires de l’emploi à former l’ensemble de leur personnel sur le sexisme et mener une réflexion pour rendre cette formation obligatoire;
Proposition 17 : Former les professionnel.le.s de santé aux questions de sexisme et d’égalité entre les femmes et les hommes et entre les sexualités ainsi qu’aux questions de santé sexuelle et reproductive (sans oublier les femmes handicapées) et développer au sein des écoles de médecines et de personnels de santé une approche spécifique sur les problématiques de santé des femmes y compris le dépistage des violences;
Proposition 18 : Former systématiquement l’ensemble des professionnel.le.s, dont la police et la justice, à accueillir les femmes victimes de violence;
Parce que la question de la place des femmes aux postes de responsabilité et de la visibilité des femmes remarquables est centrale pour s’émanciper des stéréotypes sexistes et construire la mixité, nous proposons de :
Proposition 19 : Mettre en place, dans tous les secteurs, y compris par des mesures obligatoires, des objectifs chiffrés de progression des candidatures et de nominations de femmes (quand il y a une forte majorité d’hommes) et d’hommes (dans les secteurs majoritairement féminins) ; plus spécifiquement modifier la hiérarchisation sexuée des organisations sportives fédérales du niveau national au niveau local (loi du 4 août 2014) et légiférer pour inscrire une obligation de parité dans les différents métiers visibles ou audibles à l’antenne : présentateur.trice.s, journalistes, expert.e.s, personnes interviewées, etc.;
Proposition 20 : Favoriser et inciter au développement de réseaux de femmes comme lieux de réassurance et d’innovation notamment dans les secteurs où elles sont en minorité, comme dans le domaine scientifique et technologique;
Parce que le langage et les visuels associés façonnent notre vision du monde, nous proposons de :
Proposition 21 : Inciter, dans tous les lieux de travail et de sociabilité, à adopter une communication interne et externe sans stéréotypes de sexe (prise en compte de la place et du rôle des femmes dans les organisations, marque du féminin dans les noms de métier ou les fonctions ; visuels équilibrés dans les représentations des femmes et des hommes et rédaction épicène) ; concevoir des campagnes de publicité et de communication sans clichés sexistes et mettre en avant, dans tous les supports, des modèles identificatoires de femmes;
Parce que les moyens financiers et en ressources humaines demeurent les clés d’une action efficace contre le sexisme, nous proposons de :
Proposition 22 : Demander une revalorisation des enveloppes dédiées aux droits des femmes et doter de moyens les instances en charger de ces questions.
par hfidf | Mar 17, 2015 | Articles et Tribunes
Paris, 11 février 2015
Qu’ai-je appris cette année ?
Cette année j’ai appris à dire autrice, résistant ainsi farouchement à mon correcteur orthographique de messagerie électronique qui voulait systématiquement remplacer autrice par « autruche » ou « Autriche ».
J’ai appris à dire autrice, même si on me faisait répéter plusieurs fois, avec un rictus sarcastique au coin de la bouche « autiste ?! »
J’ai appris à ne plus être schizophrène et à me conjuguer intégralement au féminin, à m’accorder tous les violons sur le même air, l’air de rien ne plus dire auteuRE – metteuSE en scène. Cela dit, notez bien que le même redresseur de tort de la même messagerie électronique persiste à corriger metteuse par
« meNteuse »…
J’ai appris à dire autrice aussi simplement qu’on dit actrice. Et là ça ne gêne personne parce que comme nous le rappelle fort bien dans ses travaux Aurore Evain le -trice sied bien à la muse, à l’inspiratrice, et ce depuis le Grand Siècle, tandis qu’il apparaît comme une verrue, un appendice mal formé à la fin du radical de celui qui ceint sur sa tête bien faite l’autorité toute puissante et toute virile de l’auteur ! Et l’Académie française droite dans ses bottes de déclarer toute péremptoire que le mot autrice, pourtant dérivé du très orthodoxe latin auctrix, est à classer parmi les féminins qui « déchirent absolument les oreilles » !… reléguant d’un tour de main notre autrice dans les eaux tristes du mauvais goût de l’éloquence française.
J’ai appris à résisté à ceux qui voulaient me faire croire qu’il fallait laisser la langue se réformer de soi-même, parce que la langue, c’est comme la société ça n’évolue pas tout seul… Et parce que je n’ai pas des siècles à vivre pour attendre que la langue accepte enfin de dire notre réalité d’aujourd’hui.
J’ai appris qu’il fallait avoir la langue de son côté pour faire autorité.
J’ai appris enfin à jouer au scrabble : depuis 2004 autrice compte parmi les mots officiels du jeu et si l’on compte bien, autrice rapporte plus de points qu’auteur. Exception notable, puisqu’en revanche elles rapportent moins de prix : de 1900 à 2013 les femmes remportent 23% des prix littéraires, soit 170 sur un total de 722 lauréats, d’après le rapport de l’Observatoire de l’Egalité produit par le MCC en 2014. La plaquette éditée par la SACD « Où sont les femmes ? » montre que dans les scènes du réseau labellisé en 2013-14 les femmes écrivent 20% des textes, soit 111 sur 552. En 2014-15 selon la même source, 24% des textes joués sont écrits par des femmes.
En 2014, j’ai appris à recompter donc.
J’ai appris à ne compter que sur nous-mêmes et notre indéfectible volontarisme pour faire bouger les lignes et ouvrir la page aux autrices, aux actrices, aux metteuses et autres empêcheuses de tourner en rond, entre soi, en vase clos.
En 2014 j’ai appris enfin à ne plus faire l’autruche, à sortir la tête de l’eau et du sable, j’ai appris à dire autrice – ça me fait encore un peu bizarre mais tant pis j’assume, sans fard et sans triche !
Aline César,
présidente de HF Ile-de-France